Nous ne saurions débuter ce blog sans rendre hommage à la place de la Comédie, qui à elle seule résume les ambitions de la ville de Montpellier à la fin du 19ème siècle, de cette ville qui se veut capitale du plus grand vignoble du monde. Aujourd’hui, cette place est devenue le coeur battant de la ville de Montpellier, l’espace où les montpelliérains aiment venir profiter des terrasses pour y siroter un café, s’extasier devant la façade du théâtre… et reconnaître que leur ville est bien belle. Ils n’ont pas tort, mais ils en oublient les principes de fondation et ne prêtent plus forcément cas à la richesse des lieux.
Certes il m’arrive bien souvent de reprocher à cette place de ne pas avoir des allures méridionales, que ses façades ne reflètent pas son origine languedocienne, et qu’au final, elle semble tout droit venue d’ailleurs, importée d’une capitale septentrionale, mais ce serait lui retirer les raisons de son existence. Elle naît aux abords de la ville dense, de cet Ecusson médiéval qu’en cette seconde moitié du 19ème siècle, les édiles ont voulu moderniser, en régularisant les axes principaux qui le structuraient. Elle est jusqu’aux années 1860 qu’un espace de transit bloqué entre le faubourg de Lattes et la vieille ville, une petite place différenciant les espaces en fonction de leur modernité et axée sur la façade d’un théâtre beaucoup plus petit. L’ouverture de la rue Maguelone, en lien avec la gare et le redressement de la rue de la Loge lui offrent de nouvelles perspectives.
La place de la Comédie naît au milieu du 18ème siècle, avec la création de la première salle de spectacles de Montpellier, voulue par le duc de Richelieu. C’est de là, tout comme dans les autres grandes villes, que vient le nom de place de la Comédie.
L’aménagement du théâtre a débuté sous des auspices peu glorieuses. Un certain Jacques Rey avait obtenu du Roi, en 1740, la possibilité d’ériger une telle salle de spectacles sur l’emplacement de l’ancienne Commune Clôture, cette ligne de remparts qui remonte à la fin du fin du 13ème siècle, et dont l’utilité se faisait de moins en moins ressentir. Un décès, l’indolence de l’héritier ont reporté le projet jusqu’à ce qu’au milieu du siècle, le très puissant duc de Richelieu s’installe à Montpellier en tant que gouverneur. Il est passionné par les arts et soutient les artistes.
Montpellier, sa cité de résidence aura son théâtre, il ne pouvait en être autrement. Le 30 novembre 1752, un premier projet est validé par le conseil politique de la cité. Les plans devaient être signés d’un des membres de la dynastie d’architectes locale, Giral, associé à un autre homme de l’art. Mais il fallait que cette salle corresponde aux attentes du gouverneur qui imposa Jacques Philippe Mareschal, l’ingénieur en chef des fortifications militaires de la province de Languedoc. Tout un aréopage d’architectes royaux vint soutenir le projet, dont le premier architecte du Roi, Gabriel. Long de 57 mètres sur 24, il devait imposer une nouvelle image de Montpellier et fut au final inauguré le 20 décembre 1755.

Cassien Bernard obtient le prix du jury pour son projet intitulé « Né dans le sérail ». Cet ancien élève de l’Ecole des Beaux-Arts de Lyon puis de Paris, contrôleur à l’agence Charles Garnier pour la construction de l’Opéra de Paris en est alors à ses débuts d’architecte. Plus tard, en 1876, il se fera connaître en décrochant un second prix de Rome et la construction du Pont Alexandre III pour l’exposition universelle.

Le théâtre doit être plus grand, plus élégant et correspondre à l’image que la bourgeoisie montpelliéraine souhaite dévoiler d’elle-même.


Source : Archives Municipales de Montpellier, fonds Gallix – cote 37S79